mercredi 6 juin 2012

7 juin – en cas de malheur


Se relever des blessures. Soigner ses blessés. Se réparer. Ce qui est beau dans le concept de résilience, c’est la liberté de reconnaître les processus qui transcendent les malheurs. La résilience réinvente la liberté – puisqu’un traumatisme n’est plus définitif (réponse aux "vérités de bon sens" du genre « les enfants maltraités maltraitent leurs enfants »). De quoi expliquer l’incroyable succès du mot. Boris Cyrulnik, qui avoue ne pas en être l’inventeur, parle d’un succès planétaire – il parait que des centaines de thèses s’en préoccupent dans le monde. Mais ce succès implique aussi des dérives : il n’est pas d’accord par exemple avec les interprétations américaines développant surtout la notion de « résistance » - résister signifie surtout réagir contre l’événement, un affrontement, alors que la résilience suppose de prendre une distance. Alors, Cyrulnik organise un congrès mondial sur la résilience, le premier du genre (à Paris, du 7 au 10 juin, ouvert à ceux qui peuvent encore s'y inscrire: http://www.congres-resilience-paris2012.com/).
Un temps, j’ai pensé que je manquais de résilience, comme si c’était un ingrédient, une protéine dans le cerveau. Je ne comprenais pas pourquoi je mettais tant de temps à « m’en sortir », tant d’années de psychanalyse, de groupes, de tentatives, d’échecs (ou du moins de sentiment d’échec)… Maintenant je sais que je n'ai pas perdu mon temps dans cette longue humanisation, malgré les rechutes et les doutes. J'ai appris que suis capable d'aimer. Et qu’il est toujours possible de réenclencher le processus de soin – soulagement quand le cœur s’ouvre, quand les larmes montent, quand la dureté s’émousse.
La résilience reste un combat à mener (« jusqu’à 120 ans », promet Cyrulnik), un processus qui ne prend jamais fin, une « interaction constante » entre ce que je suis, ce que le malheur a fait de moi, et les soutiens dont je dispose, les « banalités » qui aident à consolider l’humanité en soi, les rencontres, les mains tendues. Bien sûr, il suffit de peu pour que les images de destruction qui restent dans la mémoire soient réactivées. Et la bagarre recommence pour ne pas se soumettre à cette mémoire.
Une belle conférence de Boris Cyrulnik à Beyrouth, en février dernier, sur le site http://psychomediamagazine.fr/

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