mardi 24 janvier 2012

25 janvier - La Grande Transformation

Davos accueille les "belles personnes" (comme dit Mélanchon lorsqu'il qualifie dans un même ensemble les experts et les riches), pour cinq jours de réflexion collective sur le thème des modèles à inventer : préparer la Grande Transformation. Ayons un peu de compassion, ça doit pas être commode, par les temps qui courent, de cultiver l'optimisme.
Les organisateurs affichent la couleur : comment reformuler le système, en tenant compte des révolutions qui touchent à la fois les populations, les institutions et les technologies. Il y aura certainement de sagaces analyses, de pertinentes propositions, des pistes créatives. Mais voilà, les "peuples" resteront encore une fois à l'écart de toute cette intelligence.
Mécanisme tragique: sans doute n'y a-t-il jamais eu autant de réflexions fines, de débats stimulants, d'enthousiasmes démonstratifs - partout des instances se mobilisent, des discussions s'organisent, les uns et les autres peuvent défendre leurs positions, les imaginations sont sollicitées... Mais un grand sentiment d'impuissance surnage. Comme si une fatalité entraînait l'humanité dans le gouffre qu'elle creuse avec application.
Il est facile de dénoncer le monde de la finance, les lobbies, les intérêts nationaux, les mécanismes électoraux... Tout ce qui conduit à perpétuer des erreurs dont on connaît pourtant les effets. Mais accuser les Autres ne suffit pas - comme de croire que ce sont eux qui doivent faire l'effort.
Professionnellement, je vois sans cesse combien il est difficile de faire évoluer les pratiques des administrations, des services techniques, des entreprises. Les "bonnes raisons" invoquées se justifient toujours. Avec en fait une seule vraie raison : ce serait trop compliqué de faire autrement. Par exemple lorsque Nantes s'interrogent sur le nouveau pont à construire sur la Loire, en aval du centre: la solution la plus "simple" risque comme d'habitude de l'emporter, c'est-à-dire celle qui rassure les services et les élus. Quant à savoir s'il est possible d'éviter de construire ce pont destiné seulement à la circulation automobile, la question n'est pas même posée. Simplement parce que, aujourd'hui, les voitures assurent la très grande majorité des déplacements.
Autre exemple, personnel : lors du ravalement de ma copropriété parisienne, l'hypothèse d'un traitement par isolation externe a été écartée sans discussion. Les entreprises consultées ne savaient visiblement pas faire, l'architecte et le syndic étaient d'accord avec elles pour trouver ça compliqué, tout le monde annonçait que ce serait trop cher - ce qu'aucun devis n'a confirmé. Et compte tenu des travaux de piochage et de reconstruction qui se sont avérés nécessaires, pas sûr que le budget final aurait été supérieur.
Voir autrement c'est se heurter à deux obstacles majeurs : il est aussi difficile d'imaginer ce qu'on ne connaît pas que d'inventer la transition qui va rendre le changement supportable. Vive la paresse et l'égoïsme.

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